Au début du siècle dernier, Pascaline, une petite morvandelle, vit avec ses parents qui travaillent au service des Châtelains de Marchebeaux. Au château, Léon, son père, est ouvrier agricole et Eugénie, sa mère, lavandière. A son tour, en 1907, la jeune fille entre comme cuisinière au château où elle passera une grande partie de sa vie. Pascaline sera le lien entre plusieurs générations issues de milieux sociaux très différents : le monde rural qui semble immuable, le monde ouvrier regroupant socialistes et communistes, le monde des affaires et celui de l'aristocratie qui détiennent l'instruction et l'argent. La jeune femme n'ignore pas la notion de "classes sociales", qui se résume à ne pas confondre les riches et les pauvres, ce qui l'amènera à vivre des amours difficiles.

Pascaline traversera les épreuves des deux guerres mondiales. Au coeur du Morvan, elle ne connaîtra la guerre de 1914 / 1918 que par les récits, souvent en patois, des hommes du village partis au front et par les discussions politiques entendues au château. Par contre, elle en affrontera les répercussions : les décès des êtres chers, le retour des blessés, des invalides, l'augmentation du nombre des veuves et des orphelins. Elle vivra la seconde guerre sous l'occupation allemande, nouera des liens avec la résistance, tremblera pour ceux qui subiront représailles, arrestations ou tortures. Durant la première guerre, les femmes remplaceront les hommes au travail et prendront conscience du rôle et de la place qu'elles peuvent jouer dans la société. Pascaline les soutiendra dans leur combat pour revendiquer l'égalité entre hommes et femmes et dans leur lutte pour obtenir le droit de vote qui ne sera acquis qu'en 1944. Mère, puis grand-mère, Pascaline confiera à sa petite-fille Juliette la "Boîte Rouge" dont le contenu lui inspirera la trame de cet ouvrage.

Grâce à des recherches documentées, Annick Terriot a su faire de ce roman une fresque sociologique et historique. Les événements politiques majeurs de la première moitié du XXème siècle sont constamment présents en filigrane. Les prises de position des protagonistes, parfois réalistes, parfois enflammées, montrent toutes les divergences d'opinions de la société d'alors. Mais entre ces scènes parfois émouvantes ou virulentes, l'auteur ne se dépareille jamais de son goût à décrire le beau, qu'il soit dans la nature, l'architecture, le mobilier ou l'habillement. Un soin tout particulier est mis aussi à dépeindre objets et coutumes de la vie quotidienne. Plus qu'un simple roman du terroir, cet ouvrage est aussi le témoin fidèle d'une époque riche en changements déterminants dont nous profitons encore aujourd'hui et dont nous ignorons souvent les luttes qui y ont présidés.

On ressent chez Annick Terriot le sens inné du récit, mais elle sait aussi nous faire partager sa passion pour les valeurs auxquelles elle a toujours été attachée.